La vie dans une décharge
Trente kilomètres au sud de Vientiane : une immense décharge à ciel ouvert. Impossible à louper sur la route 13 : déchets à perte de vue et montagnes d’ordures s’accumulent sur plus de 13 hectares. Odeur nauséabonde, poussière et mouches font naturellement partie du décor.
Y vivre et y travailler semble inimaginable. Et pourtant, c’est le quotidien de 200 à 300 personnes. Hommes, femmes, adolescents, enfants. Chaque jour, ils fouillent les montagnes d’immondices dans le but de récolter du plastique et de la ferraille qu’ils vendent ensuite au centre de recyclage situé directement à l’extérieur du site d’enfouissement. Avec environ 400 tonnes de déchets produits chaque jour par les citoyens de Vientiane, il y a beaucoup de déchets à trier.
Malgré des conditions de vie et de travail très difficiles et risquées, certaines familles gagnent jusqu’à 3 millions de kips par mois, soit le double du salaire minimum au Laos. Un salaire plutôt «bon», qui rend les travailleurs réticents à changer de profession.
«Maintenant, je travaille dans une usine. Je couds des sacs. Mais je gagne moins que lorsque je travaillais à la décharge. Et je n’ai pas d’horaire de travail flexible comme j’aurais pu avoir auparavant » déclare Mali*, une mère de famille que nous soutenons pour qu’elle puisse envoyer ses enfants à l’école.
Une école mobile pour ceux qui n’y ont pas accès
Vivre dans la décharge est souvent synonyme de manque d’éducation pour les enfants qui ne sont pas envoyés à l’école. C’est pourquoi notre équipe Peuan Mit (Friends au Laos) a eu l’idée d’une école mobile qui se déplace dans les communautés. Chaque semaine, l’équipe se rend à la décharge en camion pour rencontrer les enfants et leurs parents.
Les activités scolaires mobiles consistent à offrir aux enfants la possibilité de lire des livres, de dessiner, de faire du coloriage, de faire du sport comme le badminton, d’être sensibilisé à des problématiques d’hygiène, de manger des fruits et de recevoir des soins médicaux de base.
Les soins médicaux et la sensibilisation à l’hygiène sont aussi destinés aux adultes avec qui nous passons du temps pour nouer un dialogue et être à l’écoute de leurs besoins. Notre équipe Futures intervient également lors de ces visites pour informer les jeunes et leurs parents des options de formation professionnelle, leur fournir des services de conseil en orientation professionnelle et les aider à trouver un emploi meilleur et moins dangereux.
Depuis janvier 2019, les habitants de la décharge ont également accès au premier bloc sanitaire doté de toilettes, de douches et d’eau potable, construit en partenariat avec le projet britannique Small Steps. Une première étape pour l’assainissement et l’hygiène de la décharge et un bouleversant pour les jeunes filles et les femmes qui disposent maintenant d’un espace sécure et propre notamment en période de règles.
Vingt-cinq ans sur la décharge
Thavone * ramasse des ordures depuis l’âge de cinq ans. Elle a environ trente ans maintenant. Mariée et mère de trois enfants, elle se rend tous les jours à la décharge pour ramasser du plastique avant de le vendre. Heureusement pour elle et sa famille, elle ne vit pas sur place, mais dans une petite maison située à 20 km. Malgré tout, la vie reste difficile.
“C’est très sale et poussiéreux ici. Et quand il pleut, c’est vraiment difficile. J’aimerais travailler ailleurs mais je n’ai aucune compétence.”
Chaque fois que nous rendons visite à Thavone, nous lui fournissons des médicaments de base, des vêtements et surtout une oreille attentive. Quand elle a du temps libre, elle participe à nos activités et à nos séances de sensibilisation. Nous lui fournissons également du matériel scolaire pour pouvoir envoyer ses enfants à l’école.
“Ma vie est meilleure maintenant. Les travailleurs sociaux de Peuan Mit m’écoutent lorsque j’ai des problèmes, ils m’apportent un soutien très précieux.”
À l’avenir, Thavone souhaiterait ouvrir une petite entreprise à domicile. Elle serait plus proche de ses enfants. Et plus loin de la saleté et des dangers de la décharge.
*Les noms ont été changés pour protéger l’identité des bénéficiaires.